L’accueil d’une nouvelle RSS au sein de la Mission Locale, aurait pu être un fait marquant du dialogue social interne de ce mois de mars, mais un invité surprise est venu bouleverser les plans de tout un chacun à une échelle internationale. Le Covid 19 a donc imposé son calendrier et a exigé une forte capacité d’adaptation notamment sur le volet de l’organisation de la vie professionnelle.
Dans l’urgence, l’équipe d’UNIS-METIS s’est mobilisée pour réaliser et traiter un questionnaire auquel vous avez été nombreux à répondre. Nous tenons ici à vous remercier de nouveau car vos retours ont été des informations précieuses qui ont permis de faire remonter rapidement vos besoins, vos propositions et vos interrogations aux partenaires sociaux et ce, afin de contribuer à la poursuite de l’activité dans les meilleures conditions. Cette remontée d’information a également été l’occasion de présenter notre volonté de collaborer activement au dialogue social. Nous avons, d’ailleurs, exprimer le souhait d’être simple invité, aux réunions CSE.
Des modifications majeures dans les pratiques professionnelles
Les consignes sanitaires de cette période de crise ont exigé la fermeture au public de l’ensemble des structures du réseau des Missions Locales, rendant ainsi impossible les accueils physiques, principale modalité d’accompagnement.
La question du maintien de la qualité de service, s’est donc posée autrement et, bien qu’elle n’ait pas été retenue initialement par les partenaires sociaux du CSE, la mise en place du télétravail s’est finalement imposée, pour l’ensemble des salariés.
C’est ainsi que ce sujet, longtemps évité ou considéré comme fastidieux, a finalement dû être traité, en urgence, pour assurer l’accompagnement des publics, notamment pour les plus précarisés d’entre-eux.
Face à ces défis, une suite de décisions, unilatérales ou prises en CSE, a finalement abouti à :
- Un forfait mensuel de 15 euros par salarié, pour défrayer le télétravail.
- Une couverture « classique » d’assurance durant le télétravail.
- La mise à disposition par l’employeur de PC pour poursuivre l’activité professionnelle.
- La mise en place d’outils numériques pour faciliter l’accès aux dossiers et la communication entre collègues.
- Le passage à 35h de travail hebdomadaire (avec l’obligation de la prise d’une heure de RTT de 16h à 17h à compter du premier avril)
Beaucoup de ces mesures sont encourageantes. Nous sommes aussi conscients que la situation est nouvelle et qu’un temps d’adaptation est utile pour réorganiser l’activité, afin de maintenir à un niveau élevé la qualité du service public de l’emploi.
Néanmoins, nous restons vigilants sur les conditions de travail et, notamment, sur le maintien de l’herméticité et de l’équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle.
Des principes bouleversés et une considération déséquilibrée
Au cours des premières semaines, les principes essentiels qui garantissent les intérêts des salariés ont volé en éclats.
D’aucuns ont eu le sentiment que l’employeur avait cessé d’assumer à la fois son obligation de fournir du travail et celle de fournir les moyens nécessaires au travail. C’est même devenu au salarié, contre toute logique, d’assumer les frais liés aux mesures de sécurité, dont le télétravail, normalement à la charge de l’employeur.
C’est ainsi que, plutôt que de garantir le travail de ceux qui n’étaient pas contraints de s’arrêter, l’employeur à utiliser son pouvoir de subordination pour les contraindre à justifier le détail de chaque minute travaillée, comprenant celles passées à justifier le temps passé.
C’est ainsi aussi que chaque salarié s’est trouvé contraint de déclarer son patrimoine de façon très fine : dispose-t-il ou non d’un forfait internet illimité ? dispose-t-il ou non d’un forfait de téléphonie illimité ? dispose-t-il ou non d’un ordinateur ? d’un téléphone portable ? (rien en revanche sur le fait de disposer, ou pas, d’un lieu adéquate, d’une table ou d’une chaise adaptée à un travail prolongé).
C’est ainsi, enfin, que le matériel déclaré a été aussitôt réquisitionné, pour l’usage pour lequel l’employeur est subventionné, et ce, sans contrepartie initialement.
On imagine aisément le contrôleur aérien, en télétravail, obligé d’installer sa propre tour de contrôle chez lui, bien sûr… mais alors, qu’est-ce qui justifie encore un lien de subordination aussi radical, lorsque le salarié apporte à l’entreprise non-seulement son travail, mais aussi le capital nécessaire au travail ? lorsqu’il héberge le travail ? qu’il fournit aussi l’énergie nécessaire au travail, 35h par semaine ?
Serait-ce donc, désormais, le simple fait que nous soyons autorisés à travailler en contrepartie d’un salaire qui justifierait qu’on soit aussi subordonnés à ceux qui nous l’autorisent ? Ou serait-ce parce que nous sommes engagés, de façon militante, à aider nos jeunes concitoyens (qui ne comptent pas, le plus souvent, parmis les mieux lotis) que notre travail, nos biens, nos abonnements, nos logements, ne mériteraient pas la même considération que ceux du contrôleur aérien ?
Cet épisode doit donc nous donner à réfléchir. Tout comme les 15€ de participation mensuelle forfaitaire.
Le plus souvent, lorsque nous sommes installés en dehors des locaux de la Mission Locale, même au sein d’autres services publics, ceux-ci imposent à notre Direction de payer une participation, souvent en fonction de clés de répartition prenant en compte le temps d’occupation, l’espace occupé, les dépenses de loyers, d’énergie, de papiers, d’imprimante et de consommables de chaque site. Et tout le monde a toujours trouvé normal de le payer. Il n’est venu à l’idée de personne qu’une telle participation soit indue.
Mais nous, qui paie nos consommables ? Qui paie l’usage du papier d’ordinaire réservé aux travaux de nos enfants ? Qui paie l’encre ? L’électricité et le loyer ? Qui paie le fait que nos salons ne soient plus disponibles pour l’usage auquel ils sont destinés ? Pourquoi ne méritons-nous pas les mêmes égards que les personnes morales ? Pourtant, à leur différence, nous, on peut souffrir…
Les discours n’en finissent pas sur l’état de l’économie, de la conjoncture, etc. Mais le vrai débat, le seul qui compte vraiment, c’est celui de l’impact de ces changements sur nos vies. C’est celui de la place qu’on nous donne (ou de celle qu’on choisira de prendre) au cours de ces événements.
Nous sommes tous responsables des changements qui s’opèrent, dès lors où nous choisissons de laisser faire les autres, de céder à la résignation ou aux sacrifices déséquilibrés. Il nous faut donc discuter de ces changements et débattre de l’après.
Ce débat doit avoir lieu, entre-nous d’abord, puis entre les partenaires sociaux. Il est inévitable ! Nous l’appelons de nos souhaits et nous vous invitons à y participer, dès maintenant, en parlant de votre situation, de votre ressenti, de vos besoins et de vos attentes.